mardi 12 juin 2012

Le photovoltaïque fait de l’ombre au nucléaire

L’électricité photovoltaïque a la cote auprès des particuliers, mais la Confédération se fait encore prier. En 2020, les prix des courants solaire et traditionnel pourraient se rejoindre. Une énergie propre, naturelle, inépuisable, silencieuse et facile à mettre en œuvre. A la notable exception du prix, dont la baisse est toutefois constante, l’électricité solaire aurait toutes les qualités.

La disgrâce du nucléaire et les controverses sur l’éolien semblent, en tout cas, jouer en sa faveur: les particuliers sont de plus en plus nombreux à poser des panneaux photovoltaïques sur leur toit. Ou à sérieusement l’envisager.

Mais combien coûte une installation moyenne? Suffit-elle à couvrir ses besoins personnels? Quelles sont les perspectives d’avenir de cette énergie? Le point avec Dominique Progin, chef de division chez Gruyère Energie, et son collègue David Castella, responsable de projets.

L’énergie solaire photovoltaïque provient de la conversion de la lumière du soleil en électricité. Les photons heurtent les électrons et les libèrent au sein d’un matériau semi-conducteur, en général du silicium, commercialisé sous forme de panneaux.

La quantité d’énergie produite par un module photovoltaïque dépend du rendement des panneaux, de leur surface totale, de l’angle d’incidence des rayons solaires et de l’ensoleillement du lieu d’implantation. L’onduleur transforme ensuite ce courant continu en courant alternatif, conforme au réseau de distribution, pour une utilisation adaptée aux appareils électriques domestiques.
Mais attention: il ne faut pas confondre l’énergie solaire photovoltaïque avec l’énergie solaire thermique, qui, pour sa part, utilise la chaleur du soleil pour chauffer l’eau sanitaire. Les technologies sont différentes, tout comme les usages qui en sont faits, même si des panneaux hybrides pointent le bout de leur nez.

«Aujourd’hui, la quasi-totalité des particuliers optent pour une surface de panneaux comprise entre 10 et 50 m2», indique Dominique Progin. La raison en est simple: seuls les modules de moins de 50 m2 bénéficient d’une mise à l’enquête simplifiée. De plus, ceux qui dépassent 10 kW de puissance – environ 64 m2 de surface, avec des panneaux standards – nécessitent l’autorisation de l’inspection fédérale, «ce qui entraîne des délais et des charges supplémentaires», ajoute le spécialiste.

S’il a pour but de produire autant d’électricité qu’il en consomme, un ménage moyen visera les 30 m2 de surface de panneaux photovoltaïques. «Dans nos régions, cela représente une production d’un peu plus de 4 kilowatts. Soit la consommation électrique, hors chauffage, d’une famille de quatre personnes», précise David Castella.

«En trois ans, le prix des panneaux solaires a été divisé par quatre», indique David Castella. Son collègue, Dominique Progin, y voit deux raisons principales: «La fabrication à plus grande échelle, conséquence notamment de la politique énergétique de l’Allemagne, et la localisation en Chine d’une grande partie de l’industrie.»
Mais au coût des panneaux, qui ne représente qu’une partie de la facture globale, il faut ajouter celui de l’onduleur, du câblage et de la main-d’œuvre – en vue de l’installation de tous ces éléments. «Pour un dispositif complet de 30 m2, il faut compter environ 20000 francs.

Cela représente quelque 3% des coûts de construction d’une villa de 600000 à 700000 francs. Ajoutez 3000 francs pour l’achat d’un nouvel onduleur à mi-parcours, et vous connaissez vos frais pour les vingt-cinq prochaines années», calcule Dominique Progin. D’autant que les panneaux ne nécessitent, sauf imprévu technique, aucun entretien particulier.

La rétribution à prix coûtant du courant injecté (RPC), instrument national de promotion des énergies renouvelables, rembourse la différence entre les coûts de production de l’électricité photovoltaïque et le prix du marché traditionnel. Les petits producteurs de courant vert ont ainsi l’assurance de payer leur électricité au même prix que Monsieur et Madame Tout-le-monde. «Financièrement, il s’agit d’un élément fondamental. En l’absence de RPC, une installation photovoltaïque se justifie surtout par des convictions écologiques», avertit Dominique Progin.

Pour bénéficier de la RPC, les nouvelles installations doivent impérativement être annoncées auprès de Swissgrid, société nationale pour l’exploitation du réseau. Problème: les fonds d’encouragement ont atteint leur plafond, de sorte que les nouveaux projets sont placés sur liste d’attente. «Avec l’abandon programmé du nucléaire, on peut s’attendre à ce que la Confédération débloque bientôt de nouveaux moyens», estime Dominique Progin.

A noter que les entreprises régionales d’électricité, dans le cadre de leur politique du courant vert, rachètent aussi l’énergie produite par les particuliers. Mais à moindre prix: Gruyère Energie reprend le kWh solaire au tarif de 15 centimes, contre actuellement 37 centimes en moyenne pour la RPC. Avec un tarif de reprise fixé à 20 centimes, pour les propriétaires de petites et moyennes installations, Groupe E fait légèrement mieux.

Contrairement aux installations solaires thermiques, qui bénéficient d’une aide étatique s’échelonnant entre 2000 et 10000 francs, les modules photovoltaïques ne sont pas directement subventionnées par le canton. Une déduction fiscale de 100% est toutefois accordée sur le montant du matériel et des travaux, pour autant que ces derniers soient effectués sur un bâtiment existant. La notice spéciale du Service cantonal des contributions est, en effet, très claire: «Aucune déduction n’est admise pour les investissements effectués sur un immeuble neuf et dans les deux premières années suivant sa construction.»

La parité réseau sera atteinte lorsque l’électricité solaire photovoltaïque coûtera le même prix que le courant traditionnel. Les subventions étatiques pour le photovoltaïque ne seront alors plus nécessaires et l’électricité solaire deviendra définitivement concurrentielle.

«Actuellement, le kWh coûte environ 20 centimes à la prise, acheminement compris, contre 37 centimes pour le solaire», précise David Castella. Mais les deux valeurs se rapprochent. «En 2009, le prix du kWh solaire était encore estimé à 70 centimes.»
La parité réseau est-elle toute proche? Les deux spécialistes de Gruyère Energie ne se risquent pas à un pronostic, mais plusieurs études l’annoncent pour 2020, au plus tard, dans la plupart des pays d’Europe. Y compris la Suisse. 

Le solaire, énergie du futur? Dominique Progin en est persuadé. «Il y aura de plus en plus de petites productions solaires décentralisées, mais l’avenir ne se cantonnera pas à ce seul type d’énergie. D’autres modes de production, comme la géothermie profonde, disposent également d’un grand potentiel.»

Et avant de produire écolo, il faut aussi et surtout penser aux économies d’énergie. David Castella le confirme volontiers: «Nous recevons parfois des demandes d’installation de panneaux solaires sur des bâtiments non rénovés de 1970, dont l’isolation profiterait largement plus de ces 20000 francs d’investissement.»



SourceL  http://www.lagruyere.ch/

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